Voyages

Peur de l’avion ?

Bonjour à tous,

Je sais que vous aimez tous voyager. Mais je sais aussi que beaucoup d’entre vous ont peur de l’avion. Je vais donc essayer de vous apporter mes connaissances en tant que pilote de ligne pour que vous compreniez mieux les phénomènes qui vous font peur pour pouvoir y faire face lors de vos prochains voyages.

Vue du désert du Sahara

Vue du désert du Sahara

Les principales questions qui reviennent sont :

  • Comment faites-vous quand il y a des « trous d’air » ?
  • Les avions tombent ils souvent en panne et peut-on voler avec des pannes ?
  • Qu’est ce qui est le plus dangereux le décollage ou l’atterrissage ?
  • L’atterrissage est-il automatique ?

Je vais m’efforcer de vous donner les réponses les plus claires possibles.

  • Comment faites-vous quand il y a des « trous d’air »

Tout d’abord il n’y a pas de « trous d’air » ça n’existe pas et ça n’existera jamais. L’atmosphère dans lequel nous évoluons est relativement homogène, la pression diminue de manière constante au fur et à mesure que l’altitude augmente mais la composition et l’homogénéité reste la même.

Alors qu’est ce qui crée cette sensation désagréable de chute de temps à autre ?

La réponse est : Les turbulences.

L’atmosphère a beau être homogène elle n’en reste pas moins en mouvement, comme l’eau de la mer ou d’une rivière. Elle bouge de manière verticale mais aussi de manière horizontale et c’est ce qui crée les turbulences.

Il y a 3 types de turbulences :

Celles dues à la convection (formation des nuages), celles dues au Jets (forts vents d’altitude) et celles dues aux ondes orographiques (vent qui vient taper une montagne).

  • Les turbulences de convection : la surface de la Terre se réchauffe sous l’action du soleil mais de manière différente en fonction de la nature des sols. Un parking chauffera plus qu’une forêt ou qu’un lac. Les bulles d’air plus chaudes ont tendance à monter et former des nuages. Plus l’air est instable et plus les mouvements d’air verticaux seront importants et créeront des nuages turbulents. Le pire de tous étant le cumulonimbus qui peut monter jusqu’à plus de 10km d’altitude.
  • Les turbulences dues au Jets : Les Jets sont des veines de vent que l’on rencontre en haute altitude ils peuvent atteindre plus de 150km/h. Ils peuvent faire jusqu’à 500km de large sur plus de 5000Km de long mais ne sont épais que de 1000m. C’est le frottement entre une masse d’air stable et ces vents forts qui créent la turbulence que l’on retrouve dessous et sur les côtés des jets.
  • Les turbulences liées aux ondes orographiques : Lorsque des vents importants tapent des reliefs comme le mistral dans les Alpes des courant ascendants et descendants en forme de « vague » se créent derrière le relief et sous ces ondes on retrouve des tourbillons importants (comme les tourbillons crées derrière un rocher dans un torrent).
Ondes orographiques

Ondes orographiques

Les avions de ligne se déplacent dans les masses d’air à plus de 800km/h. Lorsqu’ils rencontrent des courants ascendants et descendants l’avion subit ces courants comme une voiture qui prendrait des nids de poule trop vite. Ce qui crée cette sensation désagréable. Concernant les turbulences de convection nos radars météos sont performants et nous permettent d’éviter les cellules orageuses très convectives qui sont bien visibles au radar. Les turbulences liées aux jets et aux ondes orographiques sont marquées sur les cartes et nous prenons le plus souvent des routes pour les éviter. Toutefois quand nous rencontrons des turbulences que nous ne pouvons pas éviter, nous réduisons la vitesse pour moins les ressentir. Même si la sensation est très désagréable il n’y a pas de danger à traverser, même de fortes turbulences. Les résistances des avions sont calculées pour endurer d’énormes contraintes. Bien plus importantes que celles que l’on rencontre habituellement et si nous adoptons la bonne vitesse il n’y a pas de risque particulier. Le danger vient plus de l’intérieur lorsque les passagers ne respectent pas les consignes de sécurité et n’attachent pas leur ceinture. Si le mouvement vertical est important vous pouvez vous retrouver au plafond. DONC attachez toujours votre ceinture et celle de vos enfants lorsque vous ne vous déplacez pas.

  • Les avions tombent ils souvent en panne et peut-on voler avec des pannes ?

Les avions ont des systèmes complexes et volent beaucoup il est donc normal que des pannes surviennent. Cependant tous les systèmes sont redondants avec des circuits séparés ce qui fait que la panne d’un circuit n’affecte pas l’autre circuit. Au sol nous avons une liste des équipements M.E.L (Minimum Equipement List) qui peuvent être en panne et avec lesquels nous avons tout de même le droit de décoller et les précautions que nous devons prendre le cas échéant. Si l’équipement n’est pas sur la liste l’avion est « NoGo » et ne peut pas partir sans réparation par des mécaniciens agréés. En vol des pannes peuvent survenir comme je l’ai dit précédemment les systèmes sont redondant. Ensuite toutes les pannes sont listées dans un manuel que nous appelons le QRH (Quick Reference Handbook) qui contient toutes les check lists liés à ces pannes. Lorsqu’une panne arrive en vol nous analysons le problème et nous effectuons la check list qui va résoudre ce problème. Puis nous évaluons les risques (technique, météo, commercial) pour prendre la meilleure décision pour garantir la sécurité du vol, des passagers et de l’aéronef. Toutes ces procédures sont codifiées, mises à jour et nous nous entraînons tous les 6 mois au simulateur pour vérifier que nous les maîtrisons parfaitement.

Boeing 737-800

Boeing 737-800

  • Qu’est ce qui est le plus dangereux le décollage ou l’atterrissage ?

D’une manière générale les phases les plus critiques sont celles qui ont lieu près du sol. Mais tout a été mis en place au fur et à mesure des progrès techniques pour diminuer les risques et prendre le maximum de marges. Les performances de décollage par exemples sont toutes calculées en envisageant la panne d’un moteur juste avant le lever des roues. De plus elles garantissent un taux de monté qui permet de passer les obstacles avec une marge d’altitude. Les charges emportées (passagers, bagages, fret…) sont d’ailleurs parfois limitées pour pouvoir respecter ces performances. Nous sommes aussi entraînés à traiter toutes les pannes qui peuvent survenir au décollage.

L’atterrissage est aussi une phase critique du vol et là aussi des marges sont mises en place pour limiter les risques. Des minimas météo de visibilité et de nuages sont déterminés pour chaque terrain. Des limites de vent arrière et de travers sont publiées pour les atterrissages piste sèche et mouillée. Mais aussi des critères de stabilisations (vitesse, altitude, vitesse verticale…) sont à respecter au cours des approches. En cas de problème une remise de gaz doit être effectuée. C’est une procédure normale à laquelle nous sommes entraînés et qui permet de garantir des atterrissages parfaitement maîtrisés. Sur chaque terrain des instruments au sol ou des trajectoires GPS nous permettent de nous guider jusque très bas sur l’axe de piste.

Boeing 737 au couché du soleil

Boeing 737 au couché du soleil

  • L’atterrissage est-il réalisé par le pilote automatique ?

Pour pouvoir effectuer un atterrissage automatique trois critères doivent être respectés.

  • l’avion doit avoir la capacité de le faire
  • l’équipage doit avoir suivi une formation qualifiante
  • le terrain doit être équipé d’aide radioélectrique performante et de balisage lumineux suffisant.

Les atterrissages automatiques ne peuvent se faire que si le vent est dans certaines limites. ils sont donc effectués souvent en temps de brouillard quand les visibilités sont très mauvaises mais l’air relativement stable. Les avions d’aujourd’hui ont la capacité de se poser avec une visibilité nulle en conservant l’axe de piste et en freinant automatiquement. Sur le réseau sur lequel j’opère bien que l’avion ai la capacité de faire des atterrissages automatiques, les terrains ne sont pas agréés et nous n’avons pas non plus la qualification pour le faire. Nous posons donc systématiquement en manuel.

Boeing 737 en finale à la Réunion

Boeing 737 en finale à la Réunion

J’espère que ces précisions vous permettront de passer un excellent voyage. La prochaine fois que vous prendrez l’avion je vous souhaite de moins appréhender  votre prochain vol. Si vous avez des questions n’hésitez pas à les poser dans les commentaires ci-dessous. Si jamais vous avez trouvé l’article intéressant n’hésitez pas à le partager sur les réseaux sociaux.

Cockpit d'un Boeing 737-800

Cockpit d’un Boeing 737-800

You Might Also Like...

4 Comments

  • Reply
    Pat
    septembre 4, 2018 at 9:18

    Merci pour ces précisions rassurantes, j’avoue être moins anxieuse depuis que j’ai pu assister à un vol dans le cockpit (phases de décollage et d’atterrissage). Il me faut quelques piqures de rappel comme cet article pour éviter de stresser à nouveau inutilement …

  • Reply
    admin
    septembre 4, 2018 at 11:51

    Merci beaucoup pour ce commentaire je suis content que ça vous ai plu !

  • Reply
    Papi
    septembre 5, 2018 at 2:56

    Merci beaucoup son a paul !!! J’aurais un ti guiguine moins peur

    • Reply
      admin
      septembre 7, 2018 at 1:48

      Ravi d’avoir pu t’aider un peu Marine ! À bientôt.

Leave a Reply